Un pur artisanat
On commence l’année avec un focus couteau. Nous avions effleuré le sujet des manches de couteaux haiku qu’il n’est pas inutile d’approfondir ici. En effet, on parle beaucoup des aciers japonais et de leur affûtage mais on oublie trop souvent l’importance du manche car il faut aussi être à l’aise avec son couteau.
Chroma France décline justement aciers et préhensions différentes pour un savant mélange de sensations. Chroma utilise en particulier du bois de honoki pour ses gammes traditionnelles, une espèce de magnolia aux qualités uniques : un bois ni trop dur ni trop mou et facile à entretenir. Il existe plusieurs qualités selon les couches d’écorce, des manches bruts Haiku Home destinés à une utilisation peu intensive aux manches Haiku traités anti-humidité et Haiku Kurouchi à la densité plus forte donc plus durs au toucher. Les Haiku Pro sont singuliers (voir photos à la fin du sujet). Différents process de tailles et de polissages successifs pour arriver à la forme idéale avant l’application à la main avec du coton d’ibota, un arbuste japonais à fleurs blanches dont le résultat donne un rendu ciré clair. C’est le même processus qui fut employé dans les temps anciens pour les shirisayas, les fourreaux des katanas de couleur blanche. En final sur Haiku Pro application d’une très esthétique corne de buffle comme virole de fixation à la fin du manche (en plastique pour Haiku et métal pour Kurouchi).
Une autre gamme a un manche très élaboré : Masahiro, un concentré de technologie y compris dans sa partie arrière. Manche en polyoxymethylene couramment appelé POM, un polymère qui devient liquide une fois chauffé et lisse comme un miroir refroidi. C’est un chimiste allemand prix Nobel en 1953 qui en étudia le premier les caractéristiques dans les années 1920 avant que les chimistes de DuPont De Nemours ne réussissent à en faire une application industrielle en 1960. Les avantages du POM sont la durabilité du matériau et le fait qu’il ne craque ni ne casse (il supplante petit à petit le bois même pour des objets traditionnels comme les flûtes en bois). C’est un matériau à mémoire de forme, au fur et à mesure la poignée s’affine et garde la forme de la main. Depuis une dizaine d’années le produit est utilisé comme subsitut pour les koiguchi des sabres de samouraï japonais à la place du cuivre. Koiguchi c’est l’ouverture des sayas pour fixer la lame dans son fourreau, le koiguchi peut être ovale ou octogonal. Les manches Masahiro sont de surcroît anti-bactériens.
Les manches de Kasumi Masterpiece sont aussi remarquables. Kasumi Masterpiece est un mariage entre des pratiques ancestrales pour la lame et la dernière technologie, manches en micarta. Le micarta est un mélange de résines phénoliques avec du papier n’absorbant pas d’humidité et résistant aux fréquents écarts de température par exemple des cuisines professionnelles. Enfin, les manches en bois précieux d’ébène de Haiku Itamae marrons veinés de noir sont d’un esthétisme rare.
Découpe du bois |
Dernier usinage pour la mise en forme |
Manches de Haiku Pro |
Voir aussi le second article consacré aux manches de couteaux japonais, concernant plus spécifiquement l’assemblage lame/manche (vidéo)