…inox, carbone, shirogami, aogami…
Nous comptons rétablir ici certaines vérités car à mesure que le couteau japonais se démocratise dans la presse et le grand public. Le thème est mal traité ou mal perçu, c’est dû au langage commercial pas très clair de certains fabricants. Mais aussi de mauvaises traductions ou d’interprétations hasardeuses.
Tout d’abord cette histoire de couteau céramique.
C’est notre première mauvaise traduction, Ceramic en anglais étant devenu céramique en français. L’aspect fragilité qui découle de cette appellation française par contre est correcte. Dernièrement nous avons eu droit à une émission de télé qui malgré de grosses mises en scène (on remarque par exemple que lorsque la caméra apparaît, les Japonais écartent discrètement leurs couteaux en acier avec lesquels ils travaillent vraiment pour prendre celui en céramique pour les besoins de la démonstration) n’a pas échappé aux poncifs habituels.
Comparaisons inadéquates entre couteau céramique haut de gamme et métal bas de gamme. Pas d’explication sur la courbe de vie du tranchant du produit (une chute drastique et définitive du tranchant les premières utilisations avec impossibilité de revenir en arrière puisque le couteau ne s’aiguise pas), etc… S”y ajoutent arguments commerciaux et contre-vérités : garanties à vie car produit “incassable” (celui qui vous dit cela, demandez à ce qu’il le jette par terre), des “affûtés à vie”, des tranchants éternels car les diamants le sont…
L’expérience accumulée dans les deux produits en l’espace de deux décennies nous permet de donner un avis… tranché sur la question. La “Ceramic” fut sans doute une réponse adéquate il y a quelque temps face aux aciers de mauvaise qualité, mais l’est-elle encore face à un couteau en acier hypereutectoïde ou un damas ? Face à des couteaux qui malgré leur dureté conservent leur flexibilité ? Face aux dernières évolutions technologiques (la découverte du couteau céramique a bientôt 30 ans) comme les revêtements en titane ou les nouveaux traitements thermiques ? La réponse est oui pour la ménagère, non pour les pros. La céramique ce n’est pas un idéal coutelier mais d’excellents couteaux d’office pour peler des fruits et les menus travaux en cuisine.
Lames en acier Shirogami – © Chroma |
Cela nous amène à une autre mauvaise interprétation : l’anglais stainless steel a donné en français l’acier inox. Un terrible abus de langage car le corollaire est qu’on pense qu’ils vont au lave-vaisselle. Or stainless = sans tache. En fait on veut dire par acier inox un acier qui contient du chrome ou d’autres produits aux propriétés désoxydantes, mais n’est jamais inoxydable à 100 % sinon il ne couperait pas. Type d’acier “inoxydable” : le VG10 rendu populaire par Kasumi, ou les aciers Chroma Type 301, la majorité des couteaux sur le marché.
Et alors l’acier carbone, kesaco ?
Là encore, abus. Car du carbone tous les couteaux en contiennent selon des proportions plus ou moins importantes. En fait le terme est devenu générique et désigne de nos jours des aciers non inox, sans adjonction de chrome. Outre leur tranchant ils sont très faciles à réaffûter (car plus on met de chrome, plus l’opération se complique, les bons couteaux s’arrêtant à 13 % de chrome), ce sont des aciers haute performance, sans impuretés. Exemples : acier SHIROGAMI (white paper steel) ou AOGAMI (blue paper steel), la différence entre les deux est que le bleu contient du tungstène en sus, lui conférant plus de résistance aux chocs. La soudure au feu de ces aciers est très difficile mais leur tranchant n’a rien de commun avec les aciers dits “inox” qui la plupart du temps sont pré-laminés en usine avant d’être aiguisés. Pour en savoir plus, le site référence : www.couteau-japonais.fr.